Le 20 décembre dernier, à quelques jours de Noël , Agathe Hotte a eu 100 ans. La mairesse de l’arrondissement de LaSalle, Mme Manon Barbe, était présente pour le dîner à la résidence où une tablée avait été créée pour accueillir les membres de la famille. Entretien avec Anne Ulrich, la fille de la centenaire.
Agathe Hotte est née en 1919. Elle est la deuxième d’une famille de seize enfants. «Quand elle a quitté la maison familiale à l’âge de 21 ans, elle a travaillé comme fille au père, puis dans un studio de photo où elle colorait de rose les joues et de rouge les lèvres. Avec beaucoup de talent d’ailleurs, selon ce que j’ai pu voir dans ses archives. Puis, elle a été mannequin. Elle a fait la page couverture du mannequin L’Oeil, notamment. C’est un photographe qui l’avait approché, car il aimait beaucoup son visage. Il est vrai qu’elle était belle et elle l’est toujours à 100 ans. »
Lorsque la nouvelle s’est rendue aux oreilles du père d’Agathe Hotte, un homme très religieux, celui-ci a fait revenir sa fille à la maison, d’abord les fins de semaine, puis à temps plein, où elle a dû soutenir sa mère dans toutes les tâches quotidiennes. Quelques années plus tard, elle a rencontré son mari, Robert Ulrich, avec lequel elle a eu six enfants dont Anne est l’aînée.
« Ce que je trouve le plus incroyable dans le fait de célébrer les 100 ans de ma mère, c’est de voir ce que chaque génération peut apporter à la société, affirme Mme Hotte.
Ce que je retiens de la sienne, c’est son sens du devoir : elle avait un souci inouï pour les détails de la vie, que ce soir dans l’organisation d’une maison, l’éducation ou dans les prises de décision.
– Anne Ulrich (fille aînée de Agathe Hotte)
Le choc des générations
« C’est dommage que mon grand-père l’ait empêché de poursuivre, elle aurait pu faire une longue et belle carrière. Ma mère a toujours gardé sa superbe. Même à 60 ans, je me souviens combien elle faisait encore attention à sa ligne, à sa peau. Prendre soin de son apparence physique a toujours été important pour elle. »
Pour Anne Ulrich qui a fait partie des mouvements de revendications féministes dans les années 70, la relation avec sa mère n’a pas été un long fleuve tranquille. « Il y a longtemps que nous ne sommes plus sur la même longueur d’onde. Même si j’ai encore des contentieux avec ma mère, il reste que c’est grâce à elle si je suis devenue la femme que je suis, car elle m’a montré un autre chemin dans la vie. »
La fêter, enfin
Anne Ulrich avoue d’ailleurs que ce n’est que depuis que sa mère est atteinte de la maladie d’Alzheimer que ses frères et elle arrivent à souligner ses anniversaires. « Elle n’a jamais voulu être fêtée. Il ne fallait jamais parler d’âge. C’était un sujet très tabou. Je me souviens qu’à ses 45 ans, j’avais réussi à lui organiser une fête à son insu. Je m’étais organisée avec l’une de mes tantes. J’avais cuisiné des recettes inédites et appelé tout le monde en cachette. Le samedi soir, tout le monde s’est pointé. Elle m’en a beaucoup voulu par la suite… »
Or, depuis quelques années, les fêtes prennent une autre tournure. « Pour ses 99 ans, nous avions loué la petite salle de la résidence et elle était très contente de voir son monde. Cet été, nous avons fait une grande fête extérieure pour ses 100 ans. Nous avions 120 invités et elle était ravie. Une de ses sœurs qui est une religieuse cloîtrée est même venue pour l’occasion. C’était tout un événement ! »